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Pour la petite histoire

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Le ramasseur de coquillages

25 septembre 2017

Les ratazazous appellent leurs oreilles des « coquillettes », parce qu’elles ressemblent aux coquillages qu’on trouve dans le sable au bord de la mer. Grâce à elles, ils entendent vraiment très bien, parfois même à des kilomètres ! Est-ce parce qu’ils ont leurs oreilles en forme de coquillages qu’ils ont eu l’idée de faire collection de ceux qu’on trouve sur la plage ? Peut-être bien. En tout cas, depuis qu’il a fait son Entrée des métiers il y a une année, c’est là le passe-temps favori du ratazazou nommé Blablablam.

Aujourd’hui, le jeune Blablablam se lève très tôt. Comme chaque matin, et comme tous les ratazazous, il doit bien se nettoyer les yeux pour enlever un à un les grains de sable que le Grand Marchand du quartier a déposés sur lui à son coucher, et qui emmêlent ses longs cils. Par sa fenêtre, il peut voir au loin les jeunes ratazazous Zoralarousse et Zazoum, à qui il donne le bonjour. Puis il mange sa salade de petits dragons bleus, en repensant à ce qui s’est passé la veille : il a vu un petit garçon, haut comme deux fois trois citrouilles, qui pleurait sur le vieux port. Ce garçon avait de si grandes oreilles ! Blablablam n’a pas pu s’empêcher de le regarder. Lui, il a de toutes petites coquillettes, les plus petites de tous les ratazazous. Ça le gêne un peu, il voudrait pouvoir les cacher pour qu’on ne le remarque pas : il a peur qu’on se moque de lui. En fait, il n’y a pas de quoi, parce qu’il entend aussi bien que les autres.

Mais assez blablaté ! Il est temps de se mettre à son métier, comme dirait son ratasuperviseur Hip-Hip-Hip-Hourram. Blablablam avale vite encore un ou deux petits dragons bleus, chante une ou deux strophes de la Radonelle, la chanson qui donne du cœur à l’ouvrage, et il part pour la plage. Blablablam a un don pour repérer les coquillages. Pour ça, il est le plus doué des ratazazous. Zoralarousse et Zazoum l’ont choisi pour leur journée de stage spécial avec jeunes ratazazous avancés. Ils l’observent attentivement, c’est intéressant de voir travailler un camarade qui en est déjà à sa Rentrée des métiers. Pourtant, ce matin, Blablablam a beau chercher, il peine à trouver le coquillage qu’il lui faut. Celui-là irait, mais il est cassé, l’autre est trop petit, un troisième trop étroit, encore un autre trop court… Et celui-là ? demandent Zoralarousse et Zazoum en lui montrant un magnifique coquillage d’une forme parfaite. Blablablam n’est pas sûr. « Non », répond-il simplement. Il n’a pas envie de rentrer ratabredouille, mais il n’est pas encore convaincu. C’est important de trouver le bon coquillage, celui qui s’adapte parfaitement à l’oreille de la personne qui va l’utiliser. Sinon, la communication ne peut pas se faire. Car les coquillages sont utiles pour communiquer avec les gens qui se trouvent en mer, là où les téléphones traditionnels ne passent pas. On appelle ça le téléphone bleu. Grâce à cette technique, on peut entendre, derrière le bruit des vagues, ce que disent les gens qui se trouvent en mer. Et, si les ondes sont bonnes, on peut même leur parler. A l’autre bout, les gens parlent à la mer, c’est aussi simple que cela. C’est un outil formidable pour les familles des marins. Tout ce qui compte, c’est de trouver le bon coquillage. Et ça, c’est le travail de Blablablam : il ramasse des coquillages pour les habitants du monde.

Le ramasseur de coquillages

Non loin de lui, Zoralarousse et Zazoum courent dans tous les sens. Zazoum a déjà une collection de coquillages de toutes les couleurs et Zoralarousse a trouvé une étoile de mer. Puis ils se mettent à retourner le sable et à creuser. A ce moment, Blablablam s’arrête net et tend la coquillette… Qu’écoute-t-il ? Zoralarousse et Zazoum se taisent. Ils finissent par entendre un bruit, eux aussi, celui grave et lointain de l’océan qui vibre entre les grains de sable, au creux d’un coquillage, mais lequel ?

Voilà que Blablablam se met à siffler quelques notes aiguës avec son nez-en-trompette : ça y est, il a trouvé ! Un grand, un très grand coquillage, juste ce qu’il cherchait. Comme il est content ! Il le nettoie bien pour enlever un à un les grains de sable, souffle un peu dedans et le secoue de manière experte. Puis il le teste en le portant à sa petite coquillette grise, murmure à la mer quelques mots d’essai, chantonne un peu… Il est satisfait : le coquillage fonctionne à merveille. Hip-Hip-Hip-Hourram serait fier de lui. Mais surtout, Blablablam se réjouit. Il a enfin trouvé un coquillage suffisamment grand pour les grandes oreilles du petit garçon qui pleurait en regardant sa maman embarquer sur le navire la veille au soir. Blablablam court à la rencontre du petit garçon pour mettre le coquillage sur son chemin, ni vu ni connu. Le petit garçon trouvera le coquillage. Blablablam effleure sa coquillette, petite mais perspicace. Il est si heureux : ce soir, il y aura du téléphone bleu.

 

Texte   Faustina Poletti
Illustration   Annick Vermot
Lecture, bruitages, mélodies   Faustina Poletti
Musique du générique   Thierry Epiney
Prise de son et mixage   Alexandre Défayes